Une exploration globale qui mêle histoire, science moderne et vision écosystémique de la vie
Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi nous sommes si souvent fatigués alors que nous n’avons jamais autant eu accès à de la nourriture, à la technologie et à l’information ? L’évolution aurait dû faire de nous des êtres adaptés, résilients, capables de prospérer… alors pourquoi tant de gens peinent à dormir ou à digérer correctement ?
Débutons par explorer, qu’est-ce que la santé au juste ?
La question peut sembler étrange, mais pour l’améliorer, il est essentiel de savoir d’où on part et ce qu’on vise exactement. Comme on va le voir, la définition de la santé évolue avec le temps, selon les connaissances et le niveau de conscience d’une société.
La santé est donc un concept à la fois malléable et complexe. Ce n’est pas quelque chose qu’on peut aborder en un bloc unique, parce qu’elle résulte de l’interaction d’une foule de facteurs.
La santé et la maladie : un continuum
En naturopathie, on dit parfois que la santé est l’état « normal » de l’être humain, et qu’il n’existe qu’une absence de santé plutôt qu’une maladie. On peut aussi voir la santé et la maladie comme deux pôles d’un même continuum : personne n’est jamais à 100 % « en santé » ou « malade » en permanence. On oscille plutôt entre différents degrés de bien-être et de mal-être, selon notre mode de vie, notre environnement et notre état émotionnel.
Illustration du livre Health Psychology : Biopsychosocial interactions. Sarafino, Smith, King
Évolution historique de la santé
Les idées sur la santé ont beaucoup changé au cours des siècles. Autrefois, la sous-alimentation et les maladies infectieuses, comme la tuberculose ou la diphtérie, étaient les principales causes de mortalité. Avec l’amélioration de l’hygiène, de la nutrition et des conditions de vie, on a vu le nombre de décès liés aux infections baisser de façon drastique, longtemps avant l’arrivée des vaccins ou des médicaments modernes.
Au 20ᵉ siècle, l’espérance de vie a augmenté de manière spectaculaire, et ce sont plutôt les maladies chroniques (comme les maladies cardiaques ou le cancer) qui se sont mises à dominer. Pour beaucoup de gens, l’industrialisation a aussi provoqué plus de stress et une plus grande exposition à des produits chimiques nocifs, ce qui a contribué à l’émergence de ces nouvelles problématiques de santé.
Les regards anciens : de la magie aux théories naturelles
Dans l’histoire, plusieurs croyaient que la maladie était causée par des esprits malins. Des chirurgies
rudimentaires existaient pour « libérer » ces esprits. Plus tard, Hippocrate a proposé l’idée que le corps contenait plusieurs « humeurs » devant rester en équilibre pour maintenir la santé.
Au Moyen Âge, la religion était très influente, et beaucoup voyaient la maladie comme une punition divine. Puis la Renaissance a ramené l’intérêt pour l’observation et la science. Au 17ᵉ siècle, des philosophes comme Descartes considéraient le corps et l’esprit comme deux entités distinctes.
Avec l’arrivée de la science moderne, on a pu étudier le corps humain de manière plus approfondie, découvrir que certains microbes causent des maladies et mettre en place de nouvelles théories pour expliquer l’origine de ces problèmes de santé.
Le modèle biomédical
Le modèle biomédical a grandi dans ce contexte. L’idée était (et reste souvent) de voir les troubles de santé comme un dérèglement purement physiologique, indépendant de la sphère psychologique ou sociale. Cela a permis des progrès énormes mais aussi un côté sombre puisque nous avons assisté avec le temps à une médicalisation et une monétisation de traitement qui n’ont rien à voir avec la santé.
Cependant, dès la fin du 19ᵉ siècle, certains médecins ont souligné le rôle du stress, du surmenage et des émotions dans l’apparition ou l’évolution de certaines maladies. Ils montraient que les facteurs de style de vie et l’état psychologique influencent réellement la santé physique.
Aujourd’hui : l’importance des habitudes de vie
Même si on sait que les habitudes de vie (alimentation, activité physique, gestion du stress) sont le facteur numéro un pour prévenir la majorité des maladies chroniques, le modèle biomédical reste très dominant. Les raisons sont multiples, notamment en lien avec l’énorme place de l’industrie pharmaceutique et l’histoire de notre système de santé.
On connaît de mieux en mieux le lien entre la personnalité et la santé. Par exemple, des traits comme le pessimisme ou l’anxiété marquée sont reliés à une plus grande fragilité physique, tandis que l’optimisme et la maîtrise de soi sont souvent associés à une meilleure longévité.
Les révolutions industrielle et numérique : un environnement qui change vite
Depuis la révolution industrielle, et encore plus depuis la révolution numérique, notre environnement s’est transformé à la vitesse grand V. Nous avons une relation de plus en plus distancée avec la nature. Des quantités énormes de produits chimiques se retrouvent dans les sols, l’eau et l’air. Notre système économique, basé sur l’extraction intensive des ressources, augmente la pression sur l’environnement.
On a aussi observé une réduction drastique de la diversité de notre microbiote, autant en quantité qu’en variété. Il est donc devenu évident que la santé humaine n’est pas séparable de la santé de la planète : quand l’environnement souffre, ça se répercute inévitablement sur nous.
Ma définition de la santé
Je propose une définition plus large de la santé, basée sur un état dynamique de bien-être global, où notre corps, notre esprit et notre conscience avancent de manière harmonieuse dans un environnement diversifié.
La santé est un état normal et naturel, qui bouge sans cesse entre différents niveaux sur le spectre « santé » ou « absence de santé ».
À l’échelle microscopique, on retrouve les bactéries, les mitochondries, les cellules… À l’échelle macroscopique, il y a la biosphère et les structures sociales qui nous entourent. Tout ça interagit pour soutenir ou perturber notre équilibre.
Sur le plan individuel, la santé touche autant l’aspect physique que psychologique, émotionnel et spirituel. Tout est relié, et notre environnement influence directement cet équilibre.
La communication, à différents niveaux, est un élément clé : elle permet de connecter ces échelles entre elles, ce qui nous aide à garder un équilibre d’ensemble.
En fin de compte, la santé n’est pas seulement quelque chose qu’on « possède » ou qu’on ne possède pas. C’est une réalité vivante, relationnelle et systémique, qui intègre la personne, la société et l’environnement en un tout cohérent.
Au final, la santé n’est pas juste une question d’absence de symptômes ou de microbes. C’est un équilibre en mouvement, influencé par notre mode de vie, par notre société et par la nature. En connaissant mieux l’histoire et la diversité des approches, on comprend que le corps et l’esprit sont profondément liés, et qu’il est impossible de séparer la santé individuelle de la santé collective ou de la santé de la biosphère en entier. L’avenir de la santé, à la fois personnelle et globale, dépend donc de notre capacité à prendre en compte tous ces facteurs, et à trouver un équilibre durable qui respecte notre nature profonde et celle qui nous entoure.
Mais qu’est-ce qui a réellement changé pour nos cellules ? Comment les révolutions agricole, industrielle puis numérique ont-elles perturbé ce que Fritjof Capra nomme « le système vivant » ?
Pénétrons maintenant dans l’univers de l’écart évolutionnaire.
Notre biologie, notre santé et notre vitalité sont le fruit de millions d’années d’évolution. À l’époque où l’Homo sapiens s’est formé, nous vivions dans un environnement en symbiose avec la nature.
Pendant la quasi-totalité de notre histoire, l’être humain était constamment en mouvement, exposé au soleil, en contact avec la terre. Notre biologie s’est donc façonnée sur des millions d’années et c’est ce qui fait qu’on ne peut pas négocier avec la nature.
L’écart évolutionnaire
Depuis la révolution agricole, il y a 10 000 ans et encore plus depuis la révolution industrielle, un fossé s’est creusé entre les conditions dans lesquelles nos cellules ont évolué et celles auxquelles elles sont aujourd’hui exposées. Notre environnement a évolué beaucoup plus rapidement que notre capacité d’adaptation.
Constats alarmants :
- La sédentarité est devenu un mode de vie généralisé.
- Notre système alimentaire actuel est basée sur l’efficacité, la réduction des coûts, plutôt que sur la qualité. Cela a mené au fait que plus de 80% de ce qui se retrouve en épicerie aujourd’hui est soit transformés ou hyper-transformés. Près de 60% de l’apport calorique des enfants canadiens provient d’aliments ultra-transformés. Cette façon de faire est très récente.
- En 70 ans, 50 % de notre microbiote a disparu.
- Plus de 150 000 toxines artificielles se sont infiltrées dans notre environnement, s’accumulant dans nos tissus, nos cordons ombilicaux, jusque dans les pôles.
Cet écart révolutionnaire provoque un chaos métabolique, un stress constant sur nos cellules et un dérèglement de nos signaux biologiques avec pour résultats une augmentation des cas de:
- fatigue chronique,
- troubles digestifs,
- difficulté à perdre du poids,
- stress intense,
- mauvaise qualité de sommeil,
- déséquilibres hormonaux,
- diabète,
- troubles de la fertilité
- etc.
« Rien en biologie n’a de sens si ce n’est à la lumière de l’évolution. – Thodosius Dobzhansky
Les niveaux d’organisation de la vie
Pour comprendre la santé, je replonge dans les principes fondamentaux qui décrivent comment la vie s’organise, de l’échelle atomique jusqu’à l’organisme complet et son environnement.
Il y a une structure à l’organisation de la vie qui passe du microscopique au macroscopique et où chaque niveau intègre totalement le niveau précédent. Cela débute avec les quarks et les gluons qui forment les atomes qui sont la base de la vie. Vous vous souvenez du fameux tableau périodique à l’école ? Un mauvais souvenir, peut-être?
Ces atomes de notre tableau périodique forme des molécules qui forment des macromolécules et ainsi de suite jusqu’à la biosphère complète. Voici les niveaux d’organisations :
- Atomes
Les éléments de base (carbone, oxygène, magnésium, phosphore…) - Molécules
Combinaisons d’atomes (acides aminés, lipides, etc.) - Macromolécules
Protéines, ADN, phospholipides… - Organites
Structures fonctionnelles comme les mitochondries. - Cellule
La plus petite unité vivante indépendante. La cellule a besoin d’énergie (ATP) fournie par les mitochondries. - Tissus
Regroupements de cellules spécialisées. - Organes
Assemblages de tissus spécialisés (cœur, foie, poumons…). - Systèmes
Ensemble d’organes interconnectés (système immunitaire, nerveux, digestif…). - Organisme
L’Homo sapiens lui-même, constitué de multiples systèmes. - Communautés
Les humains interagissent, formant des sociétés, des cultures. - Planète
Les communautés humaines influencent la santé globale de la planète.
Tout comme les lettres forment des mots, qui forment des phrases, qui forment des paragraphes, qui forment des chapitres, qui forment des sections, qui forment des livres, lesquels constituent à leur tour des bibliothèques et, au final, la connaissance tout entière. Même si certaines étapes paraissent plus marquantes que d’autres, l’ensemble demeure indissociable. Pour acquérir une connaissance cohérente, on ne peut pas se passer de certaines lettres ou sauter l’étape du livre pour passer directement à la bibliothèque.
Pourquoi cette hiérarchie est importante ?
Pour qu’un organisme (un être humain) soit en santé, ses systèmes doivent être sains. Pour que les systèmes soient sains, les organes doivent l’être également. Or, des organes en santé résultent de tissus sains, eux-mêmes composés de cellules saines. Une cellule saine a besoin de respirer et de produire de l’ATP (énergie) afin d’assurer son bon fonctionnement.
En résumé, tout part de la cellule et de sa capacité à produire de l’ATP grâce à ses mitochondries.
Dans A System Vie of Life, le physicien Fritjof Capra met l’accent sur l’interconnexion des réseaux et la manière dont chaque élément du vivant influence l’ensemble. Autrement dit, plutôt que de traiter un seul symptôme ou de modifier un unique facteur (ex. l’alimentation ou une supplémentation ciblée sur un seul symptôme), il faut considérer le système global : rythme circadien, respiration, liens sociaux, biodiversité, état de la biosphère…
Concrètement, cela implique d’améliorer son environnement « systémique » au quotidien : réduire l’exposition aux perturbateurs endocriniens, mieux gérer son stress, favoriser un mode de vie connecté à la nature, etc. et ceci peut être différent d’une personne à l’autre bien entendu.
La Mitochondrie, clé de notre santé
Les mitochondries sont des organelles produisant l’ATP, l’énergie vitale de la cellule. Elles participent à la gestion des signaux de stress, la réparation, la détoxification cellulaire, la régénération.
La MitoRésilience est un terme que j’emploie désignant la résilience de nos mitochondries. Une cellule qui résiste, s’adapte et prospère, même en milieu hostile, est une cellule MitoRésiliente.
Maximiser la santé cellulaire par les trois piliers de la MitoRésilience : Fournir, Retirer, Signaler
1. Fournir
Pour favoriser la MitoRésilience, il est nécessaire d’apporter aux cellules et aux mitochondries tout ce dont elles ont besoin :
- Nutriments essentiels, l’oxygène, le mouvement, les connexions humaines, l’équilibre lumière/obscurité.
- Optimiser le rythme circadien, l’exposition au soleil, la respiration, la qualité de l’eau et de l’air.
- Offrir un environnement nutritionnel et sensoriel riche et adapté à la biologie humaine.
2. Retirer
Pour maximiser la santé cellulaire, on voudra éliminer ce qui perturbe son équilibre. On fera en sorte de :
- Réduire les toxines environnementales, les produits chimiques, le stress chronique, les pensées négatives et les déchets métaboliques.
- Optimiser la biotransformation naturelle par le biais d’une alimentation digeste, riche en nutriments naturellement, une bonne hydratation, un transit intestinal optimal et une saine gestion du stress.
- Créer un milieu interne et externe réduisant les signaux de danger et permettant aux cellules de se régénérer et d’être en mode d’expansion plutôt qu’en protection.
3. Signaler
Les cellules répondent aux signaux de leur environnement. Ajuster ces signaux permet d’orchestrer les cycles de croissance, de réparation et de régénération. Nous pouvons aligner nos comportements sur ce que la cellule attend pour l’orienter vers la santé plutôt que vers la survie en mode stress. Pour ce faire, nos « messages » envoyés vers nos cellules se doivent d’être cohérents :
- des rythmes veille-sommeil respectés,
- des pensées adaptées,
- une respiration consciente
- l’hormèse (exposition contrôlée au froid, au jeûne, à l’exercice intense).
En répondant aux besoins propres à l’être humain nous répondons aux besoins de notre organisme et donc de nos cellules, de façon cohérente.
L’art de donner à nos cellules ce dont elles ont besoin, tout en retirant ce qui pourraient les ralentir.
Redéfinir la santé et la vitalité sur des bases solides
La naturopathie, c’est la compréhension de l’interaction profonde entre une vision globale de la santé, des facteurs qui l’influencent en tenant compte de la composition du vivant et de notre évolution en tant que sapiens.
La naturopathie, c’est aussi reconstruire un lien intime avec nos cellules, nos mitochondries, en reconnaissant l’écart évolutionnaire et en ajustant nos comportements et notre environnement. En simplifiant les choses, on pourrait dire que c’est une question de résilience cellulaire et mitochondriale. C’est ce qui m’a amené à nommer cette perspective la MitoRésilience
La MitoRésilience est notre capacité à rester, à revenir et à renforcer notre état naturel d’être, notre vitalité et notre essence individuelle unique.
Au final, la santé est bien plus qu’une absence de maladie : c’est la capacité d’un organisme complexe, relié à un environnement en pleine évolution, à maintenir un équilibre dynamique. Comprendre notre histoire évolutive, prêter attention aux signaux de nos cellules et reconnaître l’interdépendance de tous les niveaux de la vie nous pousse à développer une approche intégrée de la santé.
Aujourd’hui, chacun de nos choix – alimentaires, environnementaux, relationnels – se répercute sur notre vitalité et, en définitive, sur la biosphère tout entière. C’est en redécouvrant nos besoins fondamentaux, en retissant le lien avec la nature et en optimisant notre MitoRésilience que nous pourrons ouvrir la voie à une santé plus globale, plus consciente, et mieux adaptée au XXIᵉ siècle.
#onnepeutpasnégocieraveclanature