Temps des fêtes…découvrez les plantes amères!

par Nathalie Béringhs, ND.A. | Habitudes de vie, Les plantes, Texte avancé pour thérapeutes ou professionnels de la santé

Avez-vous un petit peu abusé ces derniers temps? Comment se passe votre digestion? Ou celle de vos clients, si vous êtes thérapeute?

Les ballonnements, la lourdeur d’estomac et les reflux acides sont des signes que la digestion a sûrement besoin d’un petit coup de pouce! Nous vous proposons donc de découvrir, ou de redécouvrir, les amers digestifs! Ils peuvent stimuler l’ensemble du système digestif, devenant plus efficace au contact de l’amertume.

L’amertume, un goût à retrouver

Les amers digestifs ont un goût… amer, cela va de soi. De nos jours, dans nos pays occidentaux, le goût pour l’amertume s’est perdu, alors qu’à une autre époque, pas si lointaine, il y avait toujours des plantes bien amères servies en cours de repas. Christophe Bernard, fabuleux herboriste français, parle d’ailleurs de « syndrome de déficience en amers » pour décrire l’épidémie de troubles digestifs chroniques en occident.

L’amertume des herbes aide à stimuler l’ensemble du système digestif :

elle fait d’abord saliver,
puis équilibre les niveaux d’acide chlorhydrique (HCl) dans l’estomac,
ce qui déclenche la production d’enzymes digestives par notre estomac, notre pancréas et notre intestin
et finalement stimule le foie à produire de la bile. Concernant le foie, c’est l’ensemble des fonctions hépatiques qui seront soutenues, dont la biotransformation hépatique (détoxification)

En plus de l’action sur les sécrétions digestives, les amers tonifient les tissus du tube digestif, et contribuent à aider les muqueuses endommagées à se réparer.

Le mouvement péristaltique est lui aussi amélioré, faisant avancer le bol alimentaire au travers de l’intestin plus efficacement. Le premier bénéfice de cela est un transit intestinal optimisé.

Inconforts digestifs

Presque n’importe qui peut utiliser des amers pour un soutien digestif supplémentaire. Or, ils seront particulièrement indiqués en cas d’inconforts digestifs tels que :

ballonnements,
gaz,
rots++,
lourdeur d’estomac après les repas,
difficulté à digérer les protéines et/ou les gras et/ou les amidons,
constipation.

Les amers sont une excellente première étape pour aider lors de ces inconforts.

Ils pourraient même être bénéfiques dans des situations n’ayant rien à voir avec la digestion : équilibre glycémique, retrouver l’appétit, soutenir les fonctions hépatiques/détox et aider à réduire les envies de sucre.

Comment les consommer?

Les plantes amères peuvent être consommées de plusieurs façons. Nous pouvons les ajouter à notre alimentation, en salade par exemple, en profiter en tisane ou choisir les teintures mères. Ces dernières sont des concentrés de plantes ayant macéré dans l’alcool pendant plusieurs semaines, libérant leurs propriétés dans le liquide.

Comment prendre des amers digestifs

1. Dans l’assiette

Avant même de penser à prendre des gouttes de plantes macérées, développons le goût pour l’amertume dans l’assiette. Parmi les plantes amères à manger et facilement accessibles, nous retrouvons :

Le chou kale et les choux en général
L’asperge
Les feuilles de pissenlit
La roquette
L’endive
La chicorée
Le rapini
Le radicchio

Consommées crues ou cuites, commencez par 1 ou 2 de ces plantes. Vous trouverez certainement sur le net une recette qui fera votre bonheur… et celui de votre digestion!

2. En infusion

Ensuite, vous pourriez prendre l’habitude de prendre une demi-tasse de tisane après les repas.
Pensons :

au boldo,
à la camomille bien infusée,
aux feuilles d’artichaut,
ou encore à la gentiane.

Vous pourriez leur ajouter des plantes aux propriétés carminatives et antispasmodiques telles que les graines de fenouil, l’anis vert, l’achillée millefeuille, la mélisse ou la menthe poivrée. Ou encore le gingembre pour soutenir le feu digestif. Et pourquoi pas des graines de cardamome? En plus d’être agréables au goût, elles sont également digestives.
Comme vous voyez, vous avez l’embarras du choix.

3. Teinture-mères (TM)

Et finalement, les gouttes concentrées de plantes seront très efficaces. Comme il existe de nombreux types d’amers digestifs, les avantages spécifiques peuvent varier en fonction du mélange d’herbes. Elles seront précieuses en cas d’inconforts mais aussi simplement si vous savez que vous allez à une soirée où votre système digestif sera malmené (repas lourds/alcool/desserts++).

Voici quelques suggestions pour la prise de TM :

Le moment idéal pour en prendre est juste avant un repas, ou environ 10 minutes avant de commencer à manger. Si vous avez oublié, ce n’est pas grave, prenez-les pendant le repas.
Les amers peuvent également être pris après un repas, surtout si vous avez un peu trop mangé ou si vous vous sentez ballonné.
La quantité à prendre recommandée est généralement de ¼ de cuillère à café (10-15 gouttes) sur votre langue, pure ou très légèrement dilué. Certains auteurs parlent plutôt de 30 gouttes. À vous d’essayer et de voir quel dosage vous convient le mieux, en commençant toujours par le plus petit nombre de gouttes.
Insaliver dans votre bouche pendant environ 10 à 15 secondes, jusqu’à ce que vous commenciez à saliver. Puis avaler. Votre système digestif est prêt pour votre repas.

Vous voudrez que la teinture amère se répande sur toute votre langue, puisqu’il y a des récepteurs amers sur l’ensemble de la langue. Le fait de tenir les amers dans votre bouche active les récepteurs de goût T2R qui envoient un signal au nerf vague dans votre cerveau. Le nerf vague transmet ensuite la sensation amère aux glandes salivaires (chargées en enzymes), à notre estomac (où l’acide chlorhydrique est stimulé), à notre pancréas (où nous avons des enzymes pancréatiques) et à notre foie/vésicule biliaire où notre bile est créée et concentrée.

La capacité à percevoir l’amertume : un processus biologique ancestral

Il existe plus de 25 types de récepteurs pour les composés amers, alors que le sucré, le salé, l’acide et l’umami n’ont chacun qu’une seule sorte de récepteur. Les récepteurs à amertume se retrouvent bien sûr sur la langue mais également dans le nez, et aussi ailleurs dans les voies respiratoires, de même que dans le cœur et les intestins. La capacité à percevoir et à éviter les molécules amères relève d’un processus biologique ancestral visant à nous protéger contre l’ingestion d’aliments toxiques. Notons toutefois que l’amertume ne signifie pas nécessairement que nous sommes face à un composé toxique. Ainsi, certaines molécules à saveur amère peuvent avoir des vertus bénéfiques pour notre santé ou être simplement comestible.

Rôle immunitaire insoupçonné

Les recherches des dernières années semblent de plus en plus attribuer aux récepteurs à amertume un rôle de première ligne de défense du système immunitaire. En effet, il a été observé que lorsque les récepteurs T2R (récepteur d’amertume) du système respiratoire sont stimulés, les cellules impliquées envoient un signal aux cellules environnantes. Cela les incite à libérer, dans le mucus des voies respiratoires, des protéines antimicrobiennes de type défensine.

De plus, les voies aériennes sont recouvertes de millions de cils. Ceux-ci bougent (battent) afin d’expulser le mucus contenant des microbes et/ou des éléments irritants inhalés. Or, la recherche a montré que les cils des cellules pulmonaires vibraient plus vite à la suite de la stimulation de leurs récepteurs T2R par des composés amers. Ces expériences suggèrent que les récepteurs du goût constituent un système d’alerte précoce de la défense immunitaire dans les voies respiratoires. Les récepteurs à amertume déclencheraient des réponses en quelques minutes, voire quelques secondes. Ces récepteurs du goût joueraient un rôle important au tout début de l’infection en déclenchant une réaction immédiate.

En cette saison virale, agrémentez votre assiette d’amers! Il a également été observé que lorsque les récepteurs du sucré détectent le glucose l’activité des récepteurs à amertume est immédiatement réduite. Vous aviez besoin d’une autre raison pour diminuer votre consommation de sucre?

Contre-indications

Bien que les amers digestifs soient généralement sécuritaires à utiliser, certaines personnes devront les éviter ou consulter leur clinicien avant de les utiliser. Pensons d’abord aux femmes enceintes. Elles doivent être très prudentes quant aux ingrédients d’une teinture amère, car certaines herbes sont contre-indiquées pendant la grossesse.
D’autres personnes qui peuvent avoir besoin de les éviter sont celles atteintes de :

maladies de la vésicule biliaire avec obstruction biliaire,
d’ulcères duodénaux,
d’appendicite,
de vomissements actifs,
d’obstruction intestinale,
ou de douleurs abdominales non diagnostiquées,
ou de SIBO de type sulfure d’hydrogène.

Vous avez un doute? Consultez d’abord votre professionnel de la santé. Ajoutons aussi qu’il pourrait être pertinent de consulter votre médecin et un naturopathe agréé afin d’identifier la cause profonde de vos problèmes digestifs.

Pour une digestion facilitée, et une absorption des nutriments optimisée, redonnez aux plantes amères leur juste place. Pour nous, naturopathes, la digestion est le point de départ de la santé… comme de bien des états de déséquilibre. Comme disait le personnage bien connu : « quand l’appétit va, tout va! »