Quand on pense à la fertilité, on pense généralement au système reproducteur, comme s’il s’agissait d’une île, comme s’il n’était pas relié aux autres systèmes.
Pourtant, mis à part la santé des organes reproducteurs et la quantité/qualité de leur produits (ovules, spermatozoïdes), d’autres systèmes et paramètres influencent la fertilité, tant chez l’homme que chez la femme.
Dans cet article, j’ai choisi de vous présenter 3 piliers affectant la fertilité. C’est loin d’être les seuls, mais ils méritent qu’on s’y attarde.
Pilier numéro 1 : la fonction mitochondriale
Les mitochondries sont réputées pour leur rôle central dans la production d’énergie au niveau cellulaire. Une cellule qui perd la capacité de produire suffisamment d’énergie perd de facto la capacité d’accomplir adéquatement ses fonctions. L’infertilité, qu’elle soit d’origine féminine, masculine ou mixte, est un trouble qui ne fait pas exception à cette règle.
Mitochondrie et fertilité féminine
Une des particularités des mitochondries est qu’elles possèdent leur propre génome (ADN mitochondrial ou ADNmt), et leur transmission est exclusivement maternelle. En effet, contrairement aux gènes (ADN nucléaire) qui sont transmis tant par le père que par la mère, les mitochondries sont exclusivement transmises par la mère.
Chaque ovocyte comporte en moyenne 100 000 mitochondries! Sachant que la majorité de nos autres cellules ne renferment « que » 300 à 2 000 mitochondries chacune, ce chiffre est vraiment impressionnant!
Cela s’explique car des quantités considérables d’énergie sont requises pour assurer le développement rapide d’un embryon.
Mitochondrie et fertilité masculine
La capacité d’un spermatozoïde à féconder un ovule est aussi directement liée à son activité mitochondriale. On a effectivement pu constater qu’en incubant le sperme d’hommes souffrant d’infertilité avec de l’ATP (molécule énergétique produite dans la chaîne respiratoire mitochondriale), on améliorait le taux de réussite du processus de fécondation in vitro.
La production d’énergie dans les mitochondries spermatiques est essentielle au mouvement des flagelles des spermatozoïdes, et donc à la capacité de ces derniers de voyager à travers les voies génitales féminines en quête d’un ovule à féconder.
Comment prendre soin de mes mitochondries ?
Des solutions existent pour soutenir la santé mitochondriale et elles sont nombreuses.
Sommairement, un mode de vie favorisant la santé, la régénération et la biogenèse des mitochondries est essentiel en démarche de fertilité, et cela passe notamment par :
- un sommeil suffisant et de qualité;
- l’intégration de moments de respiration profonde et d’outils adéquats de gestion de stress;
- une alimentation équilibrée à faible impact glycémique et densément nutritive;
- un niveau optimal, mais non excessif d’activité physique.
Certains nutriments clés peuvent aussi être essentiels pour rehausser rapidement la fonction mitochondriale. Demander conseil à votre naturopathe agréé.
Pilier numéro 2 : la fonction thyroïdienne
Si les mitochondries sont essentielles à la fertilité, elles dépendent elles-mêmes des hormones thyroïdiennes (HT) pour fonctionner optimalement.
Pleins feux sur la thyroïde
La thyroïde est la cheffe d’orchestre du métabolisme basal, c’est-à-dire qu’elle régule la production des HT capables d’activer les fonctions de toutes les cellules du corps. Son rôle est de fabriquer la T4 (inactive, qui sera activée en périphérie comme dans le foie, par exemple) et la T3 (active).
Ces hormones sont les clés qui activent les fameuses… mitochondries ! Elles en augmentent le nombre et la grosseur, favorisant ainsi la consommation d’oxygène et de nutriments par les cellules en vue de produire davantage d’ATP (molécule énergétique utilisable par la cellule).
Comment l’hypothyroïdie affecte-t-elle notre fertilité ?
Mis à part leur rôle au niveau des mitochondries, les HT sont essentielles pendant la grossesse pour la synthèse de myéline chez l’embryon, substance permettant la saine transmission des influx nerveux dans le cerveau.
On sait aussi que le corps priorise la survie de l’individu, devant les fonctions reproductrices visant la survie de l’espèce humaine. L’individu doit donc assurer son propre métabolisme de base et son énergie vitale avant de pouvoir se reproduire.
Il est donc tout à fait logique que l’hypothyroïdie entraîne des anomalies du cycle menstruel et augmente considérablement les risques de fausse couche, car de toute façon, les chances de mener à terme un bébé en bonne santé dans ces conditions métaboliques sont trop faibles.
Comment savoir si ma thyroïde est optimale ?
Au niveau médical, c’est généralement la TSH qui est mesurée dans les analyses sanguines pour évaluer la fonction thyroïdienne. Quand la TSH monte au-delà d’un certain seuil, cela est un signe que la thyroïde est en hypofonctionnement.
D’autres signes peuvent nous mettre la puce à l’oreille, même s’ils ne sont pas spécifiques (c’est-à-dire qu’ils peuvent être retrouvés dans de nombreuses autres pathologies). Si plusieurs font leur apparition, faites-vous tester! :
- Fatigue
- Prise de poids ou difficulté à en perdre
- Frilosité
- Constipation
- Peau et cheveux secs
- Perte de cheveux
- Rythme cardiaque ralenti
- Troubles de mémoire, de concentration et de l’humeur
- Perte de libido
- Troubles érectiles ou menstruels
Comment prendre soin de ma thyroïde ?
Il faudra d’abord investiguer pour comprendre les causes profondes de cet hypofonctionnement de la thyroïde, et travailler à les enrayer.
Par exemple, on va s’assurer que la thyroïde a à sa disposition tous les nutriments nécessaires à son fonctionnement. La tyrosine et l’iode sont ses matériaux de construction de base.
L’iode étant un minéral classé parmi les halogènes, il importe de limiter la présence d’autres halogènes susceptibles de prendre sa place au niveau thyroïdien, tels le chlore, le fluor et le brome. Pour cela, préférez une eau filtrée ou de source, évitez les piscines et spas au chlore ou au brome, et optez pour un dentifrice sans fluor.
Le sélénium est un nutriment essentiel à la fonction thyroïdienne. La bonne nouvelle est qu’il se trouve en excellente quantité dans les délicieuses noix du Brésil. Seules quatre ou cinq noix quotidiennes suffisent.
Plusieurs autres nutriments comme le zinc, le fer, les vitamines A, C, D et E ainsi que le magnésium sont requis pour les fonctions thyroïdiennes.
Il suffit parfois d’intégrer des algues biologiques, des poissons et des fruits de mer à son alimentation pour aller chercher de l’iode, du zinc et du sélénium en plus de protéines fournissant la tyrosine.
Pilier no 3 : l’équilibre glycémique
Même si ce pilier est plus étudié et compris de la communauté médico-scientifique en lien avec la fertilité, on ne l’aborde généralement que lorsqu’une manifestation pathologique d’un trouble glycémique est déclarée (diabète, syndrome métabolique, syndrome des ovaires polykystiques [SOPK]).
Pourtant, la santé métabolique ne bascule jamais du jour au lendemain et le cheminement vers la maladie suffit à diminuer les capacités reproductives.
La régulation glycémique, comment ça marche ?
Jusqu’à il y a quelques centaines d’années, l’humain avait toujours été davantage exposé aux périodes de famine qu’aux périodes d’abondance. Le corps humain a donc évolué en ce sens. Nous n’avons véritablement qu’une seule hormone hypoglycémiante (l’insuline) pour ramener le taux de glucose sanguin (glycémie) dans des valeurs sécuritaires après un repas, alors que nous avons plusieurs hormones et mécanismes hyperglycémiants pour ramener du glucose dans le sang en période de jeûne (glucagon, adrénaline, noradrénaline, cortisol, hormones thyroïdiennes, hormone de croissance, œstrogènes, etc.). Le corps est largement plus outillé pour faire face au manque de nourriture qu’à son excès.
Chaque fois qu’on ingère des aliments renfermant du glucose, celui-ci est absorbé dans la circulation sanguine, élevant la glycémie. Afin de faire entrer ce glucose dans les cellules, le pancréas sécrète l’insuline. Cette dernière est en quelque sorte le messager qui vient frapper à la porte des cellules pour leur dire de laisser entrer du glucose. Mais quand le messager frappe trop souvent à leur porte, les cellules finissent à moyen ou à long terme par développer une insulinorésistance.
Glycémie et fertilité
Quand de trop nombreuses cellules deviennent insulinorésistantes, la glycémie demeure élevée et cela peut engendrer de nombreux effets délétères sur la fertilité:
- Le pancréas sécrète toujours plus d’insuline, ce qui non seulement aggrave l’insulinorésistance (cercle vicieux), mais peut aussi conduire à son épuisement (diabète de type 2). De plus, les tissus ovariens étant riches en récepteurs à insuline, si celle-ci ne peut plus faire renter le glucose, leur production d’énergie est compromise.
- Le glucose excédentaire peut réagir avec des protéines. Cela peut entraver la fluidité de la circulation sanguine, et donc ralentir le transport des nutriments et de l’oxygène aux cellules.
- Les protéines glyquées (protéines liées aux glucose) sont plus fragiles à l’oxydation et peuvent donc accélérer la production de radicaux libres contribuant au vieillissement prématuré des gonades et gamètes.
- Le foie doit gérer les excès de glucose en circulation. Une fois sa capacité maximale atteinte sous forme de glycogène, il n’a d’autre choix que de convertir le glucose en triglycérides (en gras). Cela mène à la prise de poids, à la hausse du cholestérol, et à la stéatose hépatique (foie gras) affectant son propre fonctionnement. Or, le foie joue un rôle crucial dans l’équilibre hormonal en lien avec la fertilité.
Manifestations des déséquilibres glycémiques
Votre corps peut vous donner plusieurs indices plus ou moins subtils que votre glycémie n’est plus régulée de façon optimale:
- Rages de sucre et de glucides
- Besoin de grignoter fréquemment
- Faim impérieuse accompagnée d’irritabilité, voire de tremblements, de palpitations, etc.
- Sensations d’engourdissements
- Maux de tête
- Soif et besoin d’uriner fréquents
- Infections répétées (ex. : urinaires, vaginales, candidose, etc.)
Quelles solutions existent pour rétablir l’équilibre glycémique ?
L’activité physique est une solution majeure ! Il n’y a rien comme le fait de bouger pour ramener tout le métabolisme à son état physiologique d’équilibre. Bougez, peu importe comment! Même une petite marche quotidienne à bon rythme pour sentir un léger essoufflement a démontré des effets significatifs sur la santé métabolique.
Apprendre à respirer, méditer, relativiser, prioriser et se choisir est essentiel également. Le stress du quotidien n’est pas à négliger dans l’équilibre glycémique.
On veillera également à opter pour des repas densément nutritifs qui élimineront peu à peu le besoin de recourir à des collations multipliant la fréquence des pics d’insuline. Une assiette équilibrée contient en majorité des légumes, une portion de protéines et une portion de lipides de qualité. Il ne s’agit pas de couper complètement les glucides mais de leur rendre leur juste place dans l’alimentation. Vous pouvez les remplacer en partie par des baies (bleuets, mûres, framboises, canneberges, etc.) dont l’impact glycémique est considérablement plus faible et qui regorgent d’antioxydants.
Plusieurs suppléments et plantes peuvent être utiles. Je vous suggère d’en discuter avec votre naturopathe agréé.
En conclusion, vous comprendrez que la fertilité dépend de nombreux facteurs. Nous venons d’en évoquer trois mais il est impossible de tout passer en revue dans un seul article. Tous les systèmes sont interreliés et s’influencent mutuellement. Je vous encourage à ne pas cheminer seuls dans un processus de fertilité et à vous entourer d’une équipe multidisciplinaire.